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Plateformes en ligne et rubriques spécifiques de transparence : une convergence Française et Européenne

Me Benjamin Znaty
Écrit par Me Benjamin Znaty Avocat au Barreau de Paris, associé du Cabinet Taylor Wessing, spécialisé en conseil en relations commerciales et droit des nouvelles technologies
Droit du numérique
Droit commercial

Les plateformes de mise en relation sont aujourd’hui devenues des outils indispensables au développement du e-commerce et de l’innovation. En effet, ces plateformes offrent des avantages qui ne doivent pas être minimisés : ouverture des marchés à des publics toujours plus larges, augmentation de l’offre de produits et services, rapidité et accessibilité, ouverture internationale...

En outre, la crise du covid-19 a également eu un effet impressionnant sur les ventes e-commerce réalisées à partir des marketplaces et des milliers de consommateurs se sont tournés vers ces nouveaux outils afin de faire leurs achats. Pour répondre à cette demande toujours plus importante, les plateformes n’hésitent pas à procéder à des améliorations qui peuvent passer aussi bien par le lancement de nouveaux produits et services que par l’amélioration de leurs services d’intermédiation. 

Mais le développement de ces plateformes s’accompagne d’une nécessité toujours plus grande de les réguler, de les encadrer, et ce afin de prévenir les abus de certains acteurs. Il est important de bien connaître les enjeux juridiques de ces plateformes de mise en relation

Le législateur, aussi bien européen que français, a donc, par plusieurs textes, tenu à renforcer les obligations de transparence de ces plateformes. Dans la plupart des textes concernés, un dénominateur commun se distingue : l’obligation pour la plateforme de délivrer une information claire, loyale et transparente sur les offres et contenus référencés au sein d’une rubrique dédiée.

Après les CGU/CGV et la politique de confidentialité, la “rubrique de transparence” va-t-elle donc devenir une nouvelle page juridique incontournable des plateformes en ligne  ? 

Maître Benjamin Znaty, avocat spécialisé en droit des nouvelles technologies, décrypte le sujet pour vous.

 

 

1/ Une  plateforme en ligne : qu’est-ce que c’est ?

 

Il convient dans un premier temps de s’interroger sur la définition de plateforme en ligne posée par la loi. 

La loi pour une République numérique en date du 7 octobre 2016 a en effet instauré un article L.111-7 du Code de la consommation définissant un “opérateur de plateforme en ligne” comme « toute personne physique ou morale proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication en ligne reposant sur le classement ou le référencement, au moyen d'algorithmes informatiques, de contenus, de biens ou de services proposés ou mis en ligne par des tiers [et/ou] la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d'un bien, de la fourniture d'un service ou de l'échange ou du partage d'un contenu, d'un bien ou d'un service ».

Cette définition posée par la loi englobe donc une pluralité d’acteurs tels que les moteurs de recherche, les marketplaces, les comparateurs, les sites collaboratifs ou encore les réseaux sociaux. Il s’agit donc par exemple des géants Amazon et Facebook, E-bay ou encore Airbnb.

Il faut ici bien comprendre qu’il s’agit ici d’une relation juridique tripartite entre deux utilisateurs et la plateforme en ligne qui agit comme un tiers de confiance servant d'intermédiaire dans les relations entre ces deux utilisateurs. Ces utilisateurs peuvent être des consommateurs, des professionnels, ou des non-professionnels. 

L’opérateur de plateforme a donc en principe un rôle de simple intermédiaire. En effet, dans le cadre d’une marketplace par exemple, l’opérateur a pour seule mission de mettre en relation les deux parties en vue de l’exécution d’un contrat de vente. Elle n’a en revanche pas en principe à garantir la bonne exécution de la vente, mais simplement la bonne exécution de la rencontre entre les deux parties.

Cependant, on a pu observer que certaines plateformes viennent s’immiscer, voire même maîtriser, la transaction entre le vendeur et l’acheteur. Certaines plateformes imposent par ailleurs des pénalités ou peuvent procéder à un déréférencement des professionnels ne respectant pas les règles posées par la plateforme. Enfin, les modalités de classement des offres référencés sur ces plateformes ont souvent été pointées du doigt en raison de leur opacité. 

La loi pour une République numérique a donc souhaité éclaircir ces zones d’ombres en imposant aux plateformes de délivrer une « information claire, loyale et transparente » sur les conditions d’utilisation de leur service d'intermédiation. 

Mais comment les plateformes en ligne sont-elles alors aujourd’hui tenues de formaliser une telle obligation de transparence ?

 

2/ La rubrique spécifique de transparence : une convergence française et européenne

 

D’un point de vue plus concret, le code de la consommation impose en France aux plateformes de mise en relation la création d’une rubrique spécifique  ayant pour but d’alerter de façon claire, loyale et transparente les utilisateurs de l’ensemble des modalités de référencement, de dé-référencement et de classement des différentes annonces mais également de l’existence d’une relation contractuelle ou d’une rémunération ayant pour effet d’influer sur le classement des contenus, biens ou services proposés par la plateforme. Cette rubrique doit par ailleurs être « directement et aisément accessible à partir de toutes les pages du site sans que l’utilisateur ait besoin de s’identifier ». 

Un décret du 29 Novembre 2017 est à cet égard venu préciser le contenu de cette rubrique spécifique. Cette rubrique doit notamment comporter: 

  • les conditions de référencement et de déréférencement des contenus et des offres de biens et services, notamment les règles applicables pour être référencé et les obligations dont le non-respect conduit à être déréférencé ;
  • les critères de classement par défaut des offres de la plateforme et leurs principaux paramètres ;
  • l’existence ou non d’un lien capitalistique ou d’une rémunération de la plateforme influant le classement de l’offre.

En outre, cette rubrique devra comporter des informations supplémentaires si la plateforme permet la mise en relation des parties en vue de la conclusion d’un contrat (donc notamment les marketplaces permettant la conclusion d’une vente), puisque le décret impose alors que soit également directement et aisément accessible via cette rubrique : 

  • la qualité des offreurs : quelles sont les personnes qui peuvent déposer une annonce sur le site ? Est-ce un professionnel ou un consommateur ?
  • une description du service d'intermédiation ;
  • le prix du service ainsi que, s’ils existent le prix des services additionnels ;
  • les modalités de paiement ;
  • les assurances et garanties qui peuvent être offertes par la plateforme ;
  • les modalités de règlement des litiges, et le rôle de l’opérateur de la plateforme dans ce règlement. 

D’autres textes Européens viennent par ailleurs désormais imposer aujourd’hui aux plateformes  et places de marché en ligne des obligations similaires de transparence à celles prévues par la loi Lemaire.  

Ainsi, le règlement Plateform to Business (dit P2B), ayant vocation à s’appliquer aux plateformes d’intermédiation en ligne dans le cadre de leurs relations avec les entreprises utilisatrices de leurs services, impose également de nouvelles obligations de transparence aux plateformes.  En effet, l’article 5 impose aux plateformes de donner des informations sur leurs modalités de classement des produits et services en indiquant dans leurs conditions générales les principaux facteurs qui déterminent le classement ainsi que « les raisons justifiant l’importance relative de ces principaux paramètres par rapport aux autres paramètres ».

Le règlement P2B impose également aux plateformes des directives nouvelles quant aux règles de fonctionnement de leurs algorithmes de classement. Si les paramètres du classement permettent en effet d’influer sur le classement des annonces contre une rémunération, la plateforme est désormais tenue de décrire cette possibilité ainsi que les effets de la rémunération sur le classement.  

Le règlement P2B impose donc des obligations de transparence très similaires à la loi Lemaire, si ce n’est que ces informations doivent être renseignées non pas au sein d’une rubrique spécifique mais au sein des conditions générales de la plateforme. 

La directive dite Omnibus du 27 novembre 2019 qui sera transposée dans toute l’Europe d’ici fin Novembre 2021, reprend également en partie les règles issues du code de la consommation puisqu’elle impose également aux  places de marché en ligne des obligations renforcées de transparence. En effet, ces dernières sont désormais tenues de transmettre de manière claire et compréhensible des informations générales dans une section spécifique de l’interface qui doit être directement et aisément accessible à partir de la page sur laquelle les offres sont présentées. Cette information concerne les principaux paramètres qui permettent de décider du classement des offres et des services proposés. 

Enfin, le projet de règlement Européen “Digital Services Act” ayant vocation à réformer les règles de responsabilité des plateformes en ligne et réseaux sociaux à l’échelle européenne, comprend lui aussi des nouvelles obligations de transparence, en imposant notamment aux plateformes de nouvelles obligations d’information sur les mesures prises au titre de la modération des contenus, incluant les prises de décisions par algorithmes ou la modération effectuée par des êtres humains, et au titre des de l’identification des publicités et des paramètres utilisés par la plateforme pour déterminer le destinataire de la publicité. 

En synthèse, que ce soit donc au niveau national ou européen, on observe donc un vrai mouvement visant au renforcement des obligations de transparence des plateformes en ligne. 

Afin de répondre au mieux à ces différentes réglementations, il semble désormais indispensable pour les opérateurs de mettre en place à côté des classiques CGV/CGU et politique de confidentialité, une nouvelle rubrique spécifique de transparence permettant de délivrer les différentes informations rendues obligatoires par les législateurs et régulateurs européens, notamment au titre des algorithmes et règles de classement appliqués par les plateformes, pour lesquels l’opacité n’est plus permise.

Il ne reste plus qu’à s’assurer de la bonne application de ces dispositions par les acteurs concernés. Or, la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a récemment vérifié si les plateformes s’étaient bien mises en conformité avec la loi pour une République numérique et a malheureusement constaté que 73% des entreprises contrôlées n’avaient pas mis en œuvre les dispositions de la loi. Il reste donc du chemin à parcourir.

 

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