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Marketplace : quelles sont vos obligations P2C (platform to consumers) vis-à-vis des consommateurs  ?

Me Benjamin Znaty
Me Benjamin Znaty Avocat, spécialisé en droit des contrats Relu par Clémence Bonnet, Diplômée de l'École des Avocats

Aujourd’hui les marketplaces (ou plateformes en ligne) ont une place majeure dans le marché du e-commerce. Le nombre d’entreprises ayant recours à ces plateformes pour vendre leurs biens et/ou services ne cesse de croître. En 2021, 33% des ventes en ligne entre un professionnel et un consommateur pourraient être faites grâce à des places de marché, engendrant ainsi un chiffre d'affaires estimé à 130 milliards d’euros.  En 2017, ce chiffre atteignait à peine 82 milliards d’euros (d’après une étude réalisée par Xerfi).

La crise Covid-19 a notamment eu un impact incontestable sur les ventes réalisées via ces plateformes en ligne. En effet, de nombreux consommateurs ont, du fait de cette crise sanitaire, été obligés de modifier radicalement leurs habitudes de consommation. Et pour répondre à leurs besoins, beaucoup ont fait le choix des marketplaces.

La marketplace séduit les grands mais aussi plus récemment les petits commerçants. Elle offre la possibilité de toucher une clientèle toujours plus large, diverse et dispersée sur de larges territoires. 

Toutefois, ces marketplaces, lorsqu’elles s'adressent à un public de consommateurs, sont tenues au respect d’un certain nombre d’obligations légales protégeant de tels consommateurs. 

Maître Benjamin Znaty, avocat spécialisé en droit des nouvelles technologies, décrypte le sujet pour vous.

 

 

L’encadrement général des marketplaces par le code de la consommation

 

La marketplace, aussi appelée place de marché en ligne ou plateforme multi-vendeurs, est un service d’intermédiation commerciale en ligne qui va permettre de mettre en relation un vendeur et un acheteur.

Il s’agit donc d’une relation tripartite puisque la marketplace va permettre au vendeur et à l’acheteur de se rencontrer. En effet, la marketplace va d’une part, accueillir sur sa plateforme la boutique du vendeur en ligne et, d’autre part, donner accès à cette boutique aux potentiels acheteurs.

Lorsqu’un acheteur souhaite procéder à un achat, la marketplace transmet l’ordre d’achat qu’elle a reçu au marchand qui pourra alors fournir le bien ou service attendu. Ainsi, la marketplace agit comme un « simple » intermédiaire. Tout travail méritant salaire, la marketplace se rémunère généralement en prélevant une commission sur les transactions réalisées par son intermédiaire. 

Dans la relation entre l’acheteur et la marketplace, cette commission vient donc en réalité rémunérer le service d’intermédiation fourni au consommateur par cette place de marché. Or, comme tout professionnel vendant un service au consommateur en ligne, la responsabilité de la marketplace est encadrée légalement et elle ne peut donc agir comme bon lui semble envers les consommateurs.

Cela oblige en premier lieu la marketplace à communiquer à l’utilisateur avant toute transaction certaines informations essentielles. Ainsi, l’utilisateur doit notamment être informé, de manière lisible et compréhensible :

  • des caractéristiques essentielles du service d’intermédiation ;
  • du prix et de l’ensemble des frais du service d’intermédiation (notamment le montant de la commission) ;
  • des informations relatives à l’identité de la marketplace ; 
  • de l’existence des garanties fournies par la marketplace ; 
  • de la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation. 

L’essentiel de ces informations sera généralement délivré à l'utilisateur via les conditions générales de vente et d’utilisation de la marketplace. Attention, le code de la consommation oblige à communiquer ces conditions générales sur un “support durable”, c'est-à-dire un fichier permettant au consommateur de stocker ces informations et de s’y reporter ultérieurement (par exemple via un fichier pdf téléchargeable ou adressé par email). 

Les marketplaces doivent également veiller à ce que leurs conditions générales ne comportent pas des clauses abusives, sous peine d’être sanctionnées.

En application du code de la consommation, une clause est abusive lorsqu’elle engendre, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif dans la relation contractuelle entre un professionnel et un consommateur. Ces règles sont applicables peu importe la nature, la forme du contrat et le service concerné. 

Suite à un décret du 20 mars 2009, il existe par ailleurs deux listes de clauses réputées abusives. 

La première est la liste dite « noire » qui regroupe 12 clauses qui sont purement et simplement interdites. Cela veut dire que le professionnel ne pourra pas contester la décision lui reprochant la présence de telles clauses et devra les supprimer. Elles ne pourront par ailleurs être opposées au consommateur. Par exemple, il s’agit des clauses permettant au professionnel de résilier de manière discrétionnaire le contrat, sans reconnaître le même droit au consommateur. C’est aussi le cas d’une clause qui limite ou interdit au consommateur de demander réparation de son préjudice au professionnel en cas d’inexécution par ce dernier de ses obligations contractuelles.  

La seconde, la liste « grise », fait état de 10 clauses qui sont quant à elles présumées abusives, présomption qui peut cependant être renversée. Le professionnel a donc l‘opportunité de démontrer que sa clause n’est en réalité pas abusive. On retrouve dans cette liste, la clause qui reconnaît au professionnel le droit de modifier unilatéralement ses conditions générales ou celle qui soumet la résiliation du contrat à des conditions plus rigoureuses pour le consommateur que pour le professionnel.

 

L’encadrement spécifique des marketplaces par le code de la consommation 

 

Face à la croissance fulgurante de ces marketplaces, utilisées chaque jour par des milliers de consommateurs, il était donc devenu nécessaire d’encadrer de manière plus spécifique les obligations de ces dernières. Le législateur a donc voulu encadrer cette relation tripartite autour de trois piliers : clarté, loyauté et transparence.

La loi pour une République numérique (dite loi Lemaire) a donc créé l’article L.111-7 du Code de la consommation. Cet article précise que les opérateurs de plateforme en ligne doivent désormais délivrer au consommateur une «information claire, loyale et transparente » sur les conditions d’utilisation de leur service d'intermédiation. 

Les opérateurs de plateformes en ligne sont définis ici comme « toute personne physique ou morale proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication en ligne reposant sur le classement ou le référencement, au moyen d'algorithmes informatiques, de contenus, de biens ou de services proposés ou mis en ligne par des tiers [et/ou]la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d'un bien, de la fourniture d'un service ou de l'échange ou du partage d'un contenu, d'un bien ou d'un service ». Il s’agit donc d’une définition large qui permet d’y regrouper les marketplaces, les comparateurs de prix, les moteurs de recherche et même les réseaux sociaux.

Le 29 septembre 2017, un décret est venu préciser le contenu, les modalités et les conditions d’application de cet article L. 111-7 du Code de la consommation.

Ainsi les plateformes de marché en ligne que nous connaissons bien comme Amazon, Leboncoin ou même Uber sont directement visées par ce texte. 

Notons par ailleurs que la directive dite Omnibus du 27 novembre 2019 qui sera transposée dans toute l’Europe d’ici fin Novembre 2021, reprend en partie ces obligations issues du code de la consommation. Ainsi, ces obligations aujourd’hui spécifiques au marché Français s’appliqueront demain à toute l’Europe. 

Mais alors quelles sont ces obligations spécifiques auxquelles sont soumises les marketplaces ?

Cette loi impose d’un point de vue pratique aux places de marché la création d’une rubrique spécifique ayant pour but d’alerter de façon claire, loyale et transparente les utilisateurs de l’ensemble des modalités de référencement, de dé-référencement et de classement des différentes annonces, mais également de l’existence d’une relation contractuelle ou d’une rémunération ayant pour effet d’influer sur le classement des contenus, biens ou services proposés par la plateforme.

 

Sur le référencement, dé-référencement et le classement

La marketplace est tenue d’une obligation d’information sur les modalités de référencement, de dé-référencement ainsi que sur le classement des produits et des services. Cette information se fera par le biais d’une rubrique spécifique qui informera les visiteurs de l’ensemble de ces éléments. Cette rubrique doit par ailleurs être « directement et aisément accessible à partir de toutes les pages du site sans que l’utilisateur ait besoin de s’identifier ».

 

Les critères de classement par défaut des offres et leurs principaux paramètres

La transparence exige également que les visiteurs des marketplaces comprennent exactement quels sont les critères utilisés par la marketplace pour procéder à son classement et comment ce critère se définit. Cette information devra elle aussi apparaître de manière directe et être aisément accessible.

 

L’existence d’un lien capitalistique ou d’une rémunération de la plateforme influant le classement de l’offre

Les opérateurs de plateforme sont ensuite tenus de communiquer sur les résultats du classement influencés par « l'existence d'une relation contractuelle, d'un lien en capital ou d'une rémunération à leur profit ». Ceci regroupe par exemple les liens sponsorisés qui visent à favoriser la visibilité d’une marque ou d'une annonce sur le site de la marketplace. 

En outre, il existe des obligations spécifiques directement applicables aux plateformes mettant en relation des parties en vue de la conclusion d’un contrat, donc notamment les acheteurs et vendeurs des marketplaces, puisque l’article D.111-8 du Code de la consommation impose également que soit directement et aisément accessible via cette rubrique : 

  • la qualité des personnes : quelles sont les personnes qui peuvent déposer une annonce sur le site ? Est-ce un professionnel ou un consommateur ? ;
  • une description du service d'intermédiation ;
  • le prix du service ainsi que, s’ils existent le prix des services additionnels ;
  • les modalités de paiement ;
  • les assurances et garanties qui peuvent être offertes par la marketplace ;
  • les modalités de règlement des litiges.

En outre, il faut distinguer selon que la marketplace met en relation uniquement des consommateurs ou non professionnels entre eux ou alors des consommateurs avec des professionnels.

Ainsi, lorsque la marketplace met en relation des consommateurs ou des non-professionnels entre eux, elle doit faire apparaître de manière lisible et compréhensible :

  • la qualité du vendeur (particulier ou professionnel) ;
  • les sanctions encourues par un vendeur qui se présente comme un particulier alors qu’en réalité il agit à titre professionnel ;
  • le prix total des biens ou des services proposés, y compris, le cas échéant, les frais de mise en relation et tous les frais supplémentaires exigibles, sur la base du prix déclaré par le vendeur ;
  • l’existence ou non d’un droit de rétractation ;
  • l’absence de garanties légales de vente obligatoires applicables si le vendeur n’a pas la qualité de professionnel ;
  • et via un lien hypertexte, les dispositions du Code civil portant sur le droit des obligations et de la responsabilité qui peuvent s’appliquer à la relation contractuelle. 

Si par ailleurs la marketplace met également (ou uniquement) en relation des consommateurs avec des professionnels, devront également apparaître sur chaque annonce via un espace mis à disposition des vendeurs par la plateforme, les informations prévues à l’article L.221-5 du Code de la consommation en matière de e-commerce (le prix, l’identité du vendeur, le droit de se rétracter ….). 

Enfin, pour renforcer toujours plus ces obligations de loyauté, de transparence et de clarté, un seuil a été fixé à partir duquel les plateformes doivent élaborer et diffuser aux visiteurs un guide de bonnes pratiques. Ce seuil a été fixé à 5 millions de connexions par mois.

En cas de non-respect de ces obligations, l’article L.131-4 du Code de la consommation prévoit une amende administrative d’un montant de 75 000 € pour une personne physique et de 375 000 € pour une personne morale.Ainsi, les marketplaces ont tout intérêt à se mettre rapidement en conformité avec cette loi.

Notez toutefois que ces dispositions découlant du code de la consommation, elles ne sont pas applicables aux places de marché regroupant uniquement des professionnels (relation B2B - Business to Business).

L’ensemble de ces modifications ont également un impact sur les conditions générales de vente (CGV) et sur les conditions générales d’utilisation (CGU) qui devront donc être modifiées. 

N’hésitez pas à vous faire accompagner par un avocat spécialisé dans le domaine afin de vous assurer que vous avez bien procédé à la mise en conformité de votre plateforme en ligne par la mise à jour de vos CGU et de vos CGV et que vous disposez également des bonnes rubriques spécifiques de transparence applicables aux marketplaces.

 

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Me Benjamin Znaty

Avocat, spécialisé en droit des nouvelles technologies et gestion des relations commerciales, Me Benjamin Znaty conseille une clientèle française et internationale de start-up, PME et groupes internationaux. Il possède une expertise en matière de rédaction et négociation des contrats informatiques (SaaS, développement d'applications et sites web, licence de logiciels, prestation de services informatiques, tierce maintenance applicative...). Il accompagne les éditeurs de plateformes en ligne (sites e-commerce, market-place et sites de mise en relation) dans la rédaction de leurs conditions générales de vente et de service et autres mentions légales. Enfin, son expertise comprend enfin la gestion des problématiques liées à la propriété intellectuelle, protection des données personnelles et la rédaction de la documentation associée.

Relu par Clémence Bonnet

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