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Protéger son application mobile en France : comment faire ?

Maxime Wagner
Écrit par Maxime Wagner. Co-fondateur de Captain Contrat. Diplômé de Centrale Lille et l'ESSEC.

Une application mobile est un programme informatique développé pour être utilisé sur un appareil électronique mobile, tels qu’un smartphone, une tablette tactile, un baladeur numérique ou encore certains ordinateurs fonctionnant avec le système d'exploitation Windows Phone. Une application mobile est constituée de plusieurs éléments : les composants logiciels (dont l’interface graphique), la ou les bases de données ainsi que les signes qui lui permettent d’être immédiatement identifiée tels que son nom et son icône.

 

 

Comment protéger les composants logiciels ?

 

À titre préliminaire, nous renverrons le lecteur, pour davantage de détails sur ce point, à l’article intitulé « Comment protéger son logiciel en France ? ».

En substance, seuls les composants suivants, considérés comme la forme d’expression du logiciel, sont protégeables : le matériel de conception préparatoire, les programmes (code source et code objet),  l’architecture et la structure du logiciel, la documentation d’utilisation ainsi que les interfaces graphiques (apparence visuelle du logiciel qui permet son utilisation)

Hormis les interfaces graphiques, ces composants sont protégeables par le droit d’auteur spécifique du logiciel s’ils sont originaux, c’est-à-dire s’ils portent l’emprunte de la personnalité de leur(s) auteur(s). A contrario, ne sont pas protégeables par un droit de propriété intellectuelle les algorithmes, considérés comme des formules mathématiques, ainsi que les fonctionnalités, assimilées à des idées ou des concepts. Cela étant, leur reproduction pourra, sous certaines conditions, être sanctionnée sur le fondement de la concurrence déloyale. 

Le droit d’auteur spécifique du logiciel comprend des droits patrimoniaux, valables pendant une durée de 70 ans à compter du décès de l’auteur, et des droits moraux, incessibles et perpétuels.

L’un des avantages du régime spécifique des logiciels est qu’il confère automatiquement à l’employeur les droits sur le logiciel créé par ses salariés dans le cadre de leur fonction.

S’agissant des formalités à accomplir pour obtenir une protection des composants logiciels par le droit d’auteur, le principe est simple : ce droit naissant du seul fait de la création originale, aucune formalité n’est nécessaire.

Toutefois, pour que l’auteur puisse opposer ses droits sur ces composants à un tiers, il doit être en mesure de rapporter la preuve qu’il en est titulaire ainsi que la date à laquelle il les a créés. A cet effet, il est vivement recommandé de déposer les composants logiciels auprès de l’APP (Agence pour la Protection des Programmes). D’autres solutions, moins adaptées toutefois, sont également possibles : dépôt d’une enveloppe e-Soleau à l’INPI, envoi recommandé à soi-même, dépôt chez un notaire ou un huissier. 

S’agissant des interfaces graphiques, elles sont protégeable de deux façons différentes : par le droit d’auteur classique, un peu plus large que le droit d’auteur spécifique du logiciel mais selon les mêmes formalités, ainsi que par le droit des dessins et modèles. 

Enfin, en ce qui concerne la protection des composants logiciels par brevet, elle est par principe exclue et ne peut être envisagée que dans des cas très spécifiques (par exemple, si le logiciel s’insère dans une invention brevetable et constitue une étape dans le fonctionnement de celle-ci – tel le système ABS d’une voiture, par exemple).

 

Comment protéger la base de données de son application mobile ? 

 

Une base de données est définie comme un « Recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen » (art. L112-3, al.2 du CPI).

Par exemple : l’annuaire de France Telecom ou un catalogue d’exposition sur papier. 

Une base de données est protégée de deux manières différentes : par le droit d’auteur classique ainsi que par le droit sui generis du producteur de bases de données.

 

DROIT D’AUTEUR CLASSIQUE

DROIT SUI GENERIS

Titulaire : auteur (ou sans ayant-cause)  de la structure  Titulaire : producteur, i.e. personne qui prend l’initiative et le risque des investissements correspondants.

Protection : mise en forme, structure, agencement, disposition des matières, des données, manière dont elles sont présentées …

Critère : originalité (la base ne doit pas être une simple collection de données mais « un ensemble organisé et structuré » d’informations).

Protection : contenu de la base lorsque  « la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d'un investissement financier, matériel ou humain substantiel » → on protège l’investissement.

Critères : liés à la constitution de la base en tant que telle (et non aux éléments constitutifs du contenu de la base de données), tels que :

  • coûts générés par la collecte et le traitement des informations réunies dans la base de données ;
  • nombre de personnes impliquées dans le développement de la base, les efforts commerciaux ;
  • moyens consacrés pour assurer la fiabilité de l'information et le contrôle des éléments de la base (coûts de maintenance, de gestion, …).
Droits de l’auteur : droits patrimoniaux et moraux Droits du producteur : interdire tout acte d’appropriation ou de mise à disposition du public de la totalité ou d'une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu (à moins d’une reprise répétée).
Durée : 70 ans à compter du décès de l’auteur.  Durée : 15 ans après le 1er janvier de l’année suivant celle de l’investissement, renouvelables à chaque nouvel investissement.

 

Il est, dès lors, indispensable de conserver les factures fournisseurs, les notes de frais, les feuilles de salaire des personnes ayant participé à la création de la base, etc., afin de pouvoir prouver l’ampleur de l’investissement et revendiquer la protection par le droit sui generis.

Les formalités de protection d’une base de données sont les mêmes que celles exposées ci-dessus pour le logiciel, la plus adaptée étant bien évidemment le dépôt de la base auprès de l’APP.

 

Comment protéger le nom de l'application ou l'icône ? 

 

Le nom de l’application peut être déposé à titre de marque auprès de l’INPI s’il remplit certaines conditions (disponible, distinctif et licite). Une protection par la marque le protégera pour 10 années, renouvelables indéfiniment.

L’icône de l’application pourra également être protégée, de façon cumulative le cas échéant, par le droit des marques mais également par le droit d’auteur classique ainsi que par celui des dessins et modèles. 

L’intérêt de choisir entre l’une ou l’autre de ces protections dépendra :

  • des conditions de validité légales que l’icône est apte à remplir, puisqu’à chacune de ces protections correspond des critères de validité bien spécifiques (distinctivité pour la marque ; originalité pour le droit d’auteur ; nouveauté et caractère propre pour le dessin et modèle) ; 
  • de la finalité recherchée par la protection : la marque pour la protection de la fonction distinctive de l’icône, les dessins et modèles pour l’agencement du visuel en tant que tel (choix des motifs, des lignes et contours, des agencements des couleurs) et le droit d’auteur pour l’originalité de l'icône ;
  • de la plus ou moins grande facilité à opposer aux tiers, au travers de l’action judiciaire appropriée, la protection ainsi acquise.

Cela étant, il ne sera pas toujours nécessaire de faire un choix entre ces différents types de protection, celles-ci pouvant aussi très bien se cumuler.

Seul un avocat spécialisé en droit de la propriété intellectuelle saura vous conseiller sur le meilleur moyen de protéger votre création.

 

Quelles précautions prendre lorsque l'on fait appel aux services d'un tiers pour le développement d'une application mobile ?  


Le principe est que les droits d’auteur appartiennent au créateur : le développeur pour le logiciel, dont l’interface graphique, l’agence de design pour l’icône, etc…

Il est donc indispensable, lorsqu’une personne fait appel aux services de tiers, d’organiser contractuellement en amont la titularité des droits et prévoir que ceux-ci soient cédés à la personne, physique ou morale, qui exploitera l’application mobile une fois celle-ci achevée.

Deux exceptions toutefois :

  1. Si le logiciel est réalisé par un salarié dans le cadre de ses fonctions, alors les droits sur le logiciel sont automatiquement dévolus à l’employeur.
  2. De même, en cas d’œuvre collective, c’est-à-dire d’un logiciel et/ou d’une icône réalisés sous les directives d’une personne, physique ou morale, selon un cadre et des consignes très strictes, le droit d’auteur appartient d’emblée à cette personne sous le nom de laquelle le logiciel et/ou l’icône seront divulgués.

S’agissant des droits sur la marque ou les dessins et modèles, en revanche, le principe est que ceux-ci appartiennent à la personne, physique ou morale, au nom de laquelle ils ont été déposés à l’INPI. Cela étant, si le dépôt a été effectué en fraude des droits du véritable créateur, ce dernier a la possibilité de les récupérer, grâce à l’action en revendication. Il est donc indispensable de s’assurer, avant tout dépôt de la marque ou du dessin et modèle à son nom ou à celui de sa société, que son créateur a bien donné son accord à cet effet.

L’on voit que la question de la titularité des droits est très complexe et seul un avocat spécialisé en la matière pourra, par un montage contractuel adapté, éviter qu’une personne ne puisse exploiter l’application mobile qu’elle a commandée ou, tout simplement, à la réalisation de laquelle elle a contribué.

 

 

Maxime Wagner
Écrit par Maxime Wagner
Maxime Wagner est diplômé de Centrale Lille et d'un MBA à l'ESSEC. Il démarre sa carrière dans la distribution, où il s'intéresse aux méthodes de management et d'organisation ainsi qu'aux problématiques d'innovation. Fin 2012, il quitte Carrefour et lance, avec Philippe, Captain Contrat. Son objectif : lancer une start-up à impact positif sur la société et dans laquelle chacun est heureux de travailler.
Relu par Pierre-Florian Dumez. Diplômé en droit
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