Ravis de vous revoir ! Votre démarche a été enregistrée 🚀 Reprendre ma démarche
Accès client
  1. Ressources
  2. Contrats commerciaux
  3. Contrats Commerciaux
  4. Le droit de préemption d'un bail commercial

Le droit de préemption d'un bail commercial

Pierre-Florian Dumez
Écrit par Pierre-Florian Dumez. Juriste de formation. Diplômé d’un Master II en droit économique
Relu par Sofia El Allaki.

Dans le cadre d’une location d'un bien à usage d'habitation, le locataire bénéficie d’un droit de préemption qui lui confère un droit de priorité sur l’achat du logement s'il venait à être mis en vente. Depuis la loi Pinel du 18 juin 2014, le locataire d'un bail commercial bénéficie lui aussi d'un droit de préemption. Cependant, ce droit de préemption ne s'applique pas dans tous les cas et il est nécessaire de respecter une procédure pour le mettre en oeuvre. 

 

 

Droit de préemption, droit de préférence : de quoi s'agit-il ?

 

Le droit de préemption (ou de préférence) a été introduit par la loi Pinel. Il est réglementé par l’article L. 145-46-1 du Code de commerce. L'objectif est de garantir la pérennité de l'activité professionnelle exercée par le locataire, tout en rééquilibrant les relations entre bailleur et preneur.

Selon les dispositions de cet article, si le propriétaire d'un local à usage artisanal ou commercial décide de le vendre, il doit en informer prioritairement le locataire. Autrement dit, la société commerciale locataire dispose d’une priorité d’achat sur le local concerné. Ce n’est que si elle décline l’offre ou qu’elle n’est pas en mesure de l’accepter que le propriétaire peut proposer la vente du bien à un tiers.

 

Point de vigilance :
Le droit de préemption du locataire d’un bail commercial est d’ordre public. Cela signifie que le contrat ne peut pas prévoir qu'il ne s'appliquera pas (Cour de cassation, 28 juin 2018). Ainsi, si le propriétaire souhaite vendre un local commercial ou artisanal, il doit en informer préalablement le locataire, qui dispose d'un droit de priorité sur cette vente. Toute clause privant le locataire de son droit de préemption est réputée non écrite.

 

Le droit de préemption du locataire ne doit pas être confondu avec le droit de préemption commercial de la commune qui permet l'achat de :

  • Un bail commercial ;
  • Un fonds de commerce ou un fonds artisanal ;
  • Un terrain recevant déjà ou pouvant recevoir des commerces (surface de vente allant de 300 à 1 000 m²).

 

La commune qui exerce son droit de préemption doit procéder à sa revente ou bien le rétrocéder à un commerçant ou un artisan. Ce droit de préemption commercial s'applique seulement pour les biens localisés dans une zone nommée périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité.

 

Quelles sont les conditions pour bénéficier du droit de préemption ?

 

Les conditions relatives au bail

 

Les locataires ayant signé un bail commercial sont les seuls à pouvoir prétendre au droit de préemption si le bailleur du local qu'ils louent désire le vendre.

Sont exclus les locataires ayant signé : 

 

Les conditions relatives au local 

 

L’article L. 145-46-1 du Code de commerce dans sa formulation ne vise que les locaux à “usage commercial ou artisanal”. Le droit de préemption ne porte pas sur des locaux loués à usage industriel, entrepôts ou parkings. 

En revanche, les locaux à usage exclusif de bureaux ne sont pas exclus expressement du champ d'application de l'article L. 145-46-1. Il est donc nécessaire de prendre en considération l'activité exercée au sein des locaux. Si elle est de nature commerciale, l'article L. 145-46-1 du Code de commerce s'applique.

 

À noter :
Pour savoir si le local concerné entre dans le périmètre du droit de préemption, il ne faut se baser sur l'activité effectivement exercée par le locataire. La clause de destination figurant au sein bail commercial, en précise la nature.

 

Il n'est pas toujours évident de déterminer quels sont les locaux qui font l'objet de ce droit de préemption. C'est la jurisprudence qui vient préciser au cas par cas. Par exemple, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence a eu l'occasion de juger que le droit de préemption ne s’applique pas dans le cadre d’un bail conclu sur un terrain nu ayant vocation à être aménagé par le locataire afin d’y exercer une activité commerciale.

 

Les autres conditions

 

Le droit de préemption dépend également de la qualité du vendeur ou du type de vente

En effet, l’article du Code de commerce qualifie le vendeur de “propriétaire” et de “bailleur”. Cette formulation laisse sous-entendre que le droit de préemption s'applique seulement dans l’hypothèse où le vendeur cumule les casquettes de propriétaire du local et de bailleur. 

De plus, les exceptions citées plus haut indiquent que le vendeur doit céder la pleine et entière propriété du local. En cas d’indivision, ou de démembrement entre usufruitier et nu-propriétaire, seule la cession de la nue-propriété permet au locataire d'exercer son droit de préemption, mais pas la vente de l'usufruit. 

Enfin, l’article ne vise que les cas où le propriétaire bailleur “envisage” de vendre le local. 

Cette formulation implique deux choses : 

  • Il doit s’agir d’une vente et non d’un autre mode de transmission de propriété (donation, apport, échange…) ;
  • Le vendeur doit “envisager” de vendre, c’est-à-dire le faire de manière volontaire. Toute cession due à la suite d’une décision de justice, de la clôture d’une procédure collective (liquidation judiciaire), ou d’enchères publiques, n’est pas visée par l'article L. 145-46-1.
     

Quelle est la procédure à suivre pour exercer son droit de préemption ?

 

Si le droit de préemption trouve à s’appliquer, il est nécessaire de respecter une procédure. Vendeur et acheteur ont chacun des obligations à respecter. 

 

La notification de vente par le vendeur

 

Il revient au vendeur en vertu de l’application du droit de préemption de notifier au locataire son intention de vendre le local. Cette notification vaut offre de vente au profit du locataire.

Elle doit être faite par lettre recommandée avec accusé de réception ou lettre remise en main propre contre récépissé ou émargement. 

L’article L. 145-46-1 du Code de commerce précise que le propriétaire doit, à peine de nullité, inscrire dans cette notification le prix de la vente ainsi que les conditions de vente, par exemple s’il y a transfert des charges inhérentes à la vente ou encore les modalités de paiement et de transfert de propriété. 

Il revient au vendeur de rédiger cet acte de notification. En cas de pluralités de propriétaires, comme en situation d’indivision par exemple, un mandataire ou un tiers devra être désigné afin de procéder à cette notification au nom des indivis. 

Dans le cadre d’un démembrement, il revient au nu-propriétaire et à l’usufruitier de procéder ensemble à la notification de la vente auprès du locataire.

 

Les délais de réponse du locataire

 

Une fois que la notification de vente portée à la connaissance du locataire, ce dernier dispose d’un mois pour communiquer sa réponse par lettre recommandée avec avis de réception ou en main propre contre émargement ou récépissé, ou encore par acte d’huissier. 

Si le locataire souhaite user de son droit de préemption, il dispose d’un délai de 2 mois à compter de l’envoi de sa réponse pour réaliser la vente. Ce délai pourra être étendu à 4 mois s’il recourt à un prêt. 

Si le locataire ne respecte pas les délais, le propriétaire retrouve la liberté de disposer de son bien comme il le souhaite. L’acceptation initiale de l’offre de vente par le locataire ne vaut plus vente.

 

Modification de l'offre initiale 

 

Si la première notification de vente n’aboutit pas auprès du locataire ou d’un tiers, le vendeur pourra, s’il le souhaite, modifier le prix et les conditions de vente de manière plus avantageuse. 

Dans ce cas, il devra en notifier de nouveau le locataire titulaire du droit de préemption. 

Cette nouvelle offre est valable un mois auprès du locataire à compter de sa réception. Passé ce délai, le vendeur peut proposer le bien à un tiers dans les mêmes conditions. 

 

Le contrat de bail commercial peut-il écarter le droit de préemption du locataire ?

 

Le contrat de bail ne peut pas écarter purement et simplement le droit de préemption du locataire. Cependant, le propriétaire n'est pas toujours obligé d'informer le locataire de son projet de vendre son local commercial ou artisanal. Le droit de préemption n'est pas applicable dans les cas suivants : 

  • Cession unique de plusieurs locaux d'un ensemble commercial (galeries, centres commerciaux) ;
  • Cession unique de locaux commerciaux distincts, loués par un bail unique ou à des locataires différents. Il peut s'agir de locaux situés en centre-ville, contigus ou non, dans la même commune ou non ;
  • Cession d'un local commercial au copropriétaire d'un ensemble commercial. L'objectif de cette exclusion est de favoriser le regroupement des ensembles commerciaux en copropriété dans une seule main  ;
  • Cession globale d'un immeuble comportant des locaux commerciaux. Cette exclusion concerne notamment la vente d'un immeuble qui contient un local commercial et des locaux à usage d'habitation ;
  • Cession d'un local au conjoint du bailleur, à un ascendant ou un descendant du propriétaire ou de son conjoint.

 

Quelle est la sanction en cas de non-respect du droit de préemption du locataire d'un bail commercial ?

 

En cas de non-respect du formalisme de la notification à la société commerciale locataire, cette dernière est considérée comme nulle et non existante. En outre, le délai de réponse octroyé au locataire est réputé ne pas avoir commencé à courir. Toute vente ayant lieu avec un acheteur autre que lui serait elle aussi susceptible d'être annulée. Si la notification est irrégulière, le bailleur est obligé d'en adresser une nouvelle au locataire.

En outre, si le tiers acquéreur avait connaissance de l'existence d'un droit de préemption au profit au locataire, sa responsabilité délictuelle peut être engagée. Il peut donc être condamné à verser des dommages et intérêts au locataire

 

Pourquoi se faire accompagner par un avocat ?

 

Vous l’aurez compris, l’article L. 145-46-1 du Code de commerce laisse subsister un grand nombre d'incertitudes quant à son interprétation et son application. C'est pourquoi il est recommandé de se faire accompagner par un avocat lors de la vente.Un avocat pourra identifier l’existence ou non d’un droit de préemption et aider le bailleur à rédiger l’acte de notification. Le locataire peut également faire appel à un avocat pour le conseiller s'il estime que son droit de préemption n'a pas été respecté.

 

icon En résumé En résumé
  • Dans le cadre de la vente d'un local commercial, le locataire est prioritaire par rapport aux autres acquéreurs potentiels. 
  • Pour respecter le droit de préemption ou droit de préférence du locataire, le propriétaire bailleur doit l'informer de son intention de vendre le local.
  • La lettre adressée au locataire par le propriétaire est assimilable à une offre de vente. Une fois reçue, le locataire peut exercer son droit de préemption ou de préférence dans un délai d'un mois.
  • Il existe des exceptions au droit de préemption du locataire ayant signé un bail commercial : vente unique de plusieurs locaux situés au sein d'un même ensemble commercial, vente d'un local au conjoint du propriétaire bailleur, etc.

FAQ


  • Le droit de préemption du locataire ne lui permet pas de négocier le prix de vente du bien. S'il décide d'user de son droit de préemption, il doit accepter les conditions fixées par le vendeur. En revanche, le vendeur ne peut pas proposer le bien à des conditions plus avantageuses sans prévenir le locataire.

  • Si le local commercial est vendu, cela n'a pas d'incidence sur le bail commercial ou sur le sort du locataire. Le bail commercial continu à courir dans les mêmes conditions.
Sources :
Historique des modifications :
Mise à jour du 16 février 2024 : vérification des informations juridiques.

 

Juriste de formation, Pierre-Florian est diplômé d’un Master II en droit économique de l'Université d'Aix-Marseille. À la fin de ses études, il crée une start-up spécialisée dans la mise en conformité des entreprises au règlement général sur la protection des données (RGPD). Aujourd'hui, il est responsable contenu.
Relu par Sofia El Allaki. Diplômée en droit
Cet article vous a-t-il été utile ?

Une question ? Laissez votre commentaire

Vos coordonnées sont obligatoires afin que l’on puisse vous répondre

Besoin d'informations complémentaires ?
Consulter un avocat spécialisé

D'autres articles de cet avocat pourraient vous intéresser

Consultez les articles les plus lus de cet avocat