La franchise a le vent en poupe. En 2020, on comptait 1927 franchiseurs et 78 032 franchisés, pour un marché estimé à 63,88 milliards d’euros ! En 20 ans, le chiffre d’affaires global de la franchise a plus que doublé. Dès lors, il n’est pas étonnant de constater que de plus en plus d’entrepreneurs souhaitent se lancer dans le modèle de la franchise. Mais s’il comporte de nombreux avantages, ce modèle vient aussi avec ses règles et ses obligations. Si certaines sont définies dans le contrat de franchise, d’autres sont imposées par la loi. De quoi s’agit-il ? Quelles sont les obligations principales du franchiseur ?
Me Marc Berberian, avocat exerçant en droit de la franchise, vous guide sur ce sujet particulier.
Pour aller plus loin : découvrez les articles de Me Marc Berberian, avocat spécialisé en droit de la franchise et notamment l'importance du contrat de franchise dans une relation franchiseur / franchisé.
SOMMAIRE :
1/ Rappel : qu’est-ce qu’un contrat de franchise ?
Si le contrat de franchise n’est pas défini par la loi, on peut caractériser ce dernier par la réunion de trois éléments essentiels : la transmission d’un savoir-faire, le droit d’usage des marques et des signes distinctifs de l’enseigne du franchiseur, et l’assistance permanente de ce dernier.
Il s’agit d’un accord par lequel une entreprise (le franchiseur) concède à une autre (le franchisé) le droit d’exploiter son enseigne et son savoir-faire dans le but de commercialiser des produits et/ou des services. Ce droit d’exploitation est accordé en échange d’une compensation financière. Depuis la loi Doubin de 1989, le contrat de franchise doit obligatoirement être associé à la remise au candidat franchisé d’un document d'information précontractuelle, communément appelé “DIP”.
En substance, le rôle du contrat de franchise est de définir et encadrer les modalités de la relation entre franchiseur et franchisé : transmission du savoir-faire, conditions financières, assistance commerciale, clauses d’exclusivité, durée du contrat…
2/ Quelles sont les obligations principales du franchiseur ?
Les obligations principales du franchiseur
Un document d'information précontractuelle doit être remis par le franchiseur au franchisé, au moins 20 jours avant la signature du contrat de franchise. Cette obligation a été fixée par la loi Doubin du 31 décembre 1989 (codifiée par les articles L.330-3, R.330-1 et R.330-2 du Code de Commerce), dans l’objectif de protéger le candidat à la franchise en lui apportant les informations nécessaires afin qu’il soit en mesure de s’engager en toute connaissance de cause.
Le contenu du DIP est précisément défini à l’article R.330-1 du Code de commerce. Il doit comprendre des informations telles que :
- l'identité et l’adresse du franchiseur ;
- une présentation du réseau d’exploitants ;
- une présentation du marché concerné ;
- les résultats de l’entreprise ; ou encore
- la durée du contrat proposé, les conditions de renouvellement, de résiliation et de cession, ainsi que le champ des exclusivités.
A défaut de transmission du DIP, ou si le document s’avère incomplet, le franchiseur s’expose à une amende pénale dont le montant peut aller jusqu’à 1 500 euros.
A noter que le défaut d’information ayant entraîné un vice du consentement (c’est-à-dire qu’en connaissance de l’information manquante, le franchisé n’aurait pas signé) pourra entraîner une annulation du contrat de franchise.
A noter : l’obligation d’information prévue par la loi Doubin se voit renforcée et étendue, notamment avec la réforme de l’ordonnance de 2016 et l’entrée en vigueur du nouvel article 1112-1 du Code civil. Pour répondre à son obligation d’information, il pourrait être considéré que le franchiseur doive, selon le cas, et notamment selon le profil du franchisé, être amené à délivrer des informations au-delà du spectre de la loi Doubin : communiquer sur les bilans des franchisés, sur les renouvellements de contrats, le taux de turn-over au sein du réseau, etc.
D’autres obligations sont prévues par la loi. Il en va ainsi de la mise à disposition des signes distinctifs : ainsi, en plus de permettre au franchisé de vendre des produits et/ou des services, le franchiseur devra lui permettre d’utiliser les signes distinctifs de son entreprise. Ces signes distinctifs comprennent l'enseigne, le nom commercial, les brevets, les marques, les logos et les sigles. Si le franchiseur n'en est pas propriétaire, il doit être le licencié principal pour pouvoir assurer la mise à disposition de ces derniers au franchisé.
Le franchiseur a également l’obligation de transmettre son savoir-faire. Le Règlement européen n° 330/2010 du 20 avril 2010 définit le savoir-faire comme « un ensemble secret, substantiel et identifié d'informations pratiques non brevetées, résultant de l'expérience du franchiseur ». Il est généralement contenu dans un document appelé manuel opératoire remis au franchisé.
Enfin, le franchiseur a l’obligation de fournir une assistance continue (commerciale ou technique) au franchisé. Qu’il s’agisse de surmonter une difficulté, d’appliquer le savoir-faire de l’enseigne ou de bénéficier d’une formation continue, les franchisés doivent pouvoir compter sur les franchiseurs tout au long de la vie du contrat. Concrètement, le franchiseur dispose généralement d’une équipe dédiée qui se tient disponible pour répondre aux questions des franchisés et effectuer des visites régulières.
Quelles obligations du franchiseur peuvent naître de la négociation ?
Certaines obligations ne figurent pas automatiquement dans le contrat de franchise. Il est ainsi possible, dans une certaine mesure, d’ajouter des clauses particulières au contrat de franchise en fonction de ses besoins. Les obligations du franchiseur (mais aussi du franchisé) peuvent donc être négociées. Citons-en deux, parmi les plus importantes :
1- Les campagnes de communication et de publicité : Le franchiseur peut endosser l’obligation de faire bénéficier à ses franchisés de campagne de publicité et de communication, en échange du versement d’une redevance. Le contrat de franchise précise le montant de ces redevances et les modalités de fonctionnement des campagnes de communication.
2- Les clauses d'exclusivité : Deux types de clauses d'exclusivité peuvent être insérés au contrat de franchise.
En premier lieu, la clause d’exclusivité de fourniture, qui oblige le franchiseur à ne garantir aucun autre point de vente à son franchisé dans une zone géographique déterminée.
En second lieu, la clause d’exclusivité territoriale, qui garantit au franchisé une zone géographique contractuellement définie, et lui permet ainsi de se protéger de la concurrence en demeurant le seul représentant du réseau sur ce territoire.
3/ Quels sont les droits du franchiseur ?
Si le franchiseur possède des obligations envers le franchisé, il a aussi des droits.
Ces droits sont en premier lieu financiers : ils sont la contrepartie du contrat de franchise, par lequel le franchiseur met à disposition son enseigne, son savoir-faire et son assistance au franchisé. Ils se décomposent d’une part du droit d’entrée, et d’une autre part des redevances périodiques. Le droit d’entrée a pour objectif de rémunérer le franchiseur pour le travail réalisé en amont du contrat de franchise (son prix dépendra donc beaucoup de la renommée du franchiseur), tandis que les redevances périodiques visent à financer le fonctionnement du réseau (et généralement fixées en fonction du chiffre d’affaires générés par le franchisé).
Par ailleurs, le franchiseur dispose du droit de pouvoir fixer les conditions d'utilisation par le franchisé des signes de ralliement de la clientèle lui appartenant (marque, enseigne, logo...).
Il a également le droit de faire évoluer son concept, en créant un nouveau logo par exemple. Enfin, il peut exiger un droit d'exclusivité d'approvisionnement, par lequel le franchisé s’engage à ne distribuer que des produits commercialisés par le franchiseur ou par des fournisseurs spécialement désignés par ce dernier.
Le franchisé devra quant à lui respecter strictement le savoir-faire transmis et les règles de fonctionnement du concept, concept qui, pour fonctionner, doit par nature être strictement suivi. Il s’agit également d’un impératif pour l’homogénéité et la réputation globale du réseau.
4/ Quels sont les risques de sanctions en cas de non-respect par le franchiseur de ses obligations ?
Le franchiseur qui ne respecte pas ses obligations s’expose à des sanctions. A défaut d’accord à l’amiable ou de décision rendue par arbitrage, en effet, le franchisé lésé est fondé à saisir la justice. Le juge compétent en la matière est en principe tribunal du lieu où se situe le domicile du défendeur. Il est en tout état de cause plus que conseillé d’insérer une clause attributive de juridiction, déterminant dans le contrat quel tribunal sera compétent en cas de litige.
On l’a vu : si la franchise est un modèle séduisant à bien des égards, il est aussi très encadré et nécessite de respecter certaines règles. C’est la raison pour laquelle il est conseillé de se faire accompagner par un avocat avant de se lancer. Ce dernier pourra vous assister dans le développement de votre activité, et notamment dans la rédaction du contrat de franchise.