De nombreux gérants de SARL nourrissent le rêve de transmettre un jour leur entreprise à leurs enfants. L’objectif : assurer la pérennité de l’entreprise en la transmettant à des proches de confiance, mais aussi offrir une belle opportunité à ses héritiers ou légataires. Mais transmettre son entreprise ne se fait pas en un claquement de doigts. En réalité, il s’agit d’un projet d’envergure, qui se réfléchit et se prépare sur le long terme. Une absence d’anticipation ou une mauvaise organisation peut en effet engendrer de fâcheuses conséquences.
Comment passer sereinement le relais ? Cet article répond aux questions que vous vous posez en ce qui concerne la succession d’une SARL familiale.
SOMMAIRE :
- Qu’est-ce qu’une SARL de famille ?
- Dans quels cas intervient une transmission ?
- La procédure de transmission des parts sociales dans une SARL
- Quels sont les apports du Pacte Dutreil dans la transmission d’entreprise familiale ?
- Quels sont les avantages d’une transmission de parts en SARL familiale ?
1/ Qu’est-ce qu’une SARL de famille ?
D’un point de vue juridique, la SARL de famille, ou SARL familiale, est une SARL classique. Sa seule spécificité réside dans le fait qu’elle est formée de personnes parentes (frères/soeurs, conjoints, parents/enfants…), et qu’elle possède un régime fiscal particulier. En effet, les gérants de SARL familiales ont la possibilité de choisir entre l'impôt sur les sociétés (IS) et l'impôt sur le revenu (IR), contrairement aux SARL classiques qui sont imposables par défaut à l’IS.
Pour composer une SARL de famille, les associés doivent être reliés aux autres soit par des liens de parenté directe, soit par alliance.
2/ Dans quels cas intervient une transmission ?
Une transmission d’entreprise peut intervenir pour différentes raisons. Par exemple, les gérants peuvent nourrir un désir de changement qui les poussent à céder leur entreprise pour se consacrer à de nouveaux projets. Dans d’autres cas, le gérant de SARL pourra être contraint de céder sa place pour des raisons familiales ou de santé, ou bien parce qu’il souhaite préparer son départ à la retraite et transmettre son patrimoine professionnel. Enfin, la transmission d’une entreprise peut advenir au décès du gérant. Dans ce cas précis, on parlera alors de succession : les biens qu’il détenait seront légués à ses héritiers ou ses légataires, en fonction de la situation.
3/ La procédure de transmission des parts sociales dans une SARL
En principe, les modalités de transmission des parts sociales sont prévues dans les statuts de la SARL. Cependant, dans le cas où les associés ne se seraient pas penchés sur cette question, c’est le législateur qui intervient pour organiser la cession des parts sociales entre membres d’une même famille.
Ainsi, l’article L. 223-13 du Code de commerce prévoit que les parts sociales sont “librement transmissibles par voie de succession ou en cas de liquidation de communauté de biens entre époux et librement cessibles entre conjoints et entre ascendants et descendants”.
Cela signifie que la cession des parts sociales de SARL est libre lorsqu’elle intervient dans le cadre familial. Ceci constitue une exception à la règle selon laquelle la cession de parts de SARL à des tiers doit obligatoirement être soumise à une procédure d’agrément.
Il existe néanmoins une limite à ce principe. Les statuts peuvent prévoir qu’un membre de la famille (héritier, conjoint, ascendant, descendant…) ne peut devenir associé qu’après avoir été agréé par la majorité des associés. Si l’agrément est refusé aux héritiers par les associés de la SARL, une indemnité égale au montant de la valeur des parts qui leur revient devra leur être versée.
4/ Quels sont les apports du Pacte Dutreil dans la transmission d’entreprise familiale ?
Initialement instauré par la loi n° 2003-721 du 1er août 2003, le dispositif Dutreil a pour mission de réduire le coût fiscal de la transmission d’entreprise dans un cadre familial. Que la transmission soit réalisée du vivant du gérant d’entreprise ou à son décès, le pacte Dutreil permet ainsi de bénéficier d’un abattement de 75% sur la valeur des titres ou de l’entreprise individuelle transmise.
Selon l’article 787 B du Code général des impôts, ce dispositif n’est applicable qu’aux sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Il soumet par ailleurs le bénéfice de ces avantages fiscaux à certaines conditions que la loi de finances pour 2019 est venue modifier.
Les conditions d’octroi de l’abattement de 75% sont donc les suivantes :
- un engagement collectif de conservation des titres de la société d’une durée minimale de 2 ans, doublé d’un engagement individuel de conservation des titres de 4 ans minimum ;
- l’exercice d’une fonction au sein de la société, dans les 3 années qui suivent la transmission, par l’un des héritiers ou légataires.
La loi de finances de 2019 est également venue assouplir le dispositif existant. Alors que le bénéfice de l'exonération partielle était jusqu’alors subordonné à la condition que l'engagement de conservation des parts porte sur 34 % de celles-ci, il est désormais admis pour les engagements souscrits sur au moins 17 % des droits financiers, et 34 % des droits de vote.
Pour bénéficier de l’abattement prévu par le pacte Dutreil, l’acte de donation ou la déclaration de succession doit être transmise au service des impôts lors de la succession. Une copie de l’acte constatant l’engagement collectif en cours au jour de la transmission devra être jointe, ainsi qu’une copie de l’engagement individuel pris par les bénéficiaires et une attestation certifiant que l’engagement collectif est respecté au jour de la transmission.
Par ailleurs, à compter de la date de transmission, et jusqu’à la fin de l’engagement collectif, la société doit établir annuellement une attestation certifiant que l’engagement collectif est bien respecté au 31 décembre de chaque année.
5/ Quels sont les avantages d’une transmission de parts en SARL familiale ?
L’avantage principal concernant la transmission de parts en SARL familiale réside bien sûr dans la facilité avec laquelle celles-ci peuvent être cédées. Comme cité précédemment, l’article L. 223-13 du Code de commerce prévoit un principe de liberté de transmission des parts sociales par voie de succession, sauf dispositions contraires dans les statuts.
En outre, il existe un avantage fiscal à cette transmission. En effet, dans le cadre d’une SARL classique, la cession des parts sociales qui génèrent une plus-value est imposable à l'impôt sur le revenu. Dans le cadre d’une SARL de famille, en revanche, la cession des parts sociales est exonérée d’imposition sur cette plus-value. L’associé doit cependant céder la totalité de ses parts pour bénéficier de cette exonération
Mais il existe d’autres moyens pour optimiser la transmission de son patrimoine. La création d’une SARL familiale en vue de louer des biens meublés non professionnels et le démembrement des parts sociales de cette société permet ainsi de préparer avantageusement sa succession. Les associés profiteront à cet égard du régime fiscal des Loueurs de meublés non professionnels (LMNP) permettant de déduire l’intégralité des charges comme les frais d’assurance, les dépenses de copropriété ou encore les travaux d’entretien.
Le gérant d’une SARL familiale de location meublée non professionnelle peut anticiper sa succession en cédant la nue-propriété à ses héritiers, tout en conservant l’usufruit des parts sociales. Plus cette opération est réalisée tôt, moins les frais de cession de parts sociales seront élevés. Au décès du donateur, l'usufruit s’éteint et les héritiers recouvrent la pleine propriété des parts sociales, ce qui permet de réduire le coût de la transmission. A la différence de la SCI, la SARL familiale de location meublée permettra aux associés de bénéficier des avantages du régime réel de LMNP, tels que la progressivité de l'impôt sur le revenu et la déduction des charges réelles de gestion de l’immeuble. Il leur sera également possible de choisir entre l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, ce qui n’est pas le cas pour les associés d’une SCI, soumise au régime de l’impôt sur les sociétés.
En matière de transmission d’entreprise, on l’a vu, l’anticipation est donc la clé. Un avocat spécialisé en droit des affaires pourra vous aider à préparer votre succession et à réaliser au mieux cette procédure : n’hésitez pas à prendre conseil auprès d’un tel professionnel, qui saura vous faire bénéficier de son expérience et de son expertise.